LISE BRAUN & GALERIE A
présentent
CHARLES SERRUYA AU LATITUDE 43
Exposition du 13 juillet au 13 octobre 2023
Visites privées sur rendez-vous : 06 11 05 33 72
Une longue silhouette de paquebot surplombe le golfe de Saint-Tropez. Ce bâtiment remarquable nommé Latitude 43 est un ancien hôtel de luxe riche d’une histoire passionnante. Elle commence dans le Saint-Tropez des années 30, par la rencontre d’une riche héritière moderne et déterminée avec un architecte d’avant-garde…
Début des années 30, Sainte-Maxime. L’architecte Georges Henri Pingusson fait la connaissance de Renée Gaudin, une riche héritière qui mène grand train avec son compagnon Georges Bernet. C’est au cours d’une discussion basée sur les valeurs de l’hospitalité que Renée Gaudin est séduite par l’esprit cultivé de Pingusson. Elle songe alors à investir une partie de sa fortune dans l’hôtellerie et fonde sa société hôtelière. Elle vient de trouver un site magique de 7 hectares aux portes de Saint-Tropez… L’architecte n’a pas le coup de foudre, pourtant, moins de deux ans plus tard cette pinède magnifique abritera le chef d’œuvre de sa vie, Le Latitude 43.
Le premier palace de Saint-Tropez
Pingusson est un poète idéaliste mais aussi un homme résolument moderne qui rêve d’un hôtel d’un nouveau genre, « un monastère laïc » selon ses propres termes, dans l’esprit de ce que les hôteliers nomment aujourd’hui le « luxe décontracté ». Il rêve d’y accueillir Colette, Dunoyer de Segonzac, le couturier Paul Poiret… Plus pragmatique, René Gaudin ambitionne de rivaliser avec les plus grands palaces de la Côte de l’époque : Le Negresco, le Carlton et son voisin le Golf-Hôtel de Beauvallon construit en 1912. Le programme immobilier retenu est pharaonique : un hôtel de 110 chambres, un restaurant de 300 places, un parc de sport avec tennis, deux piscines d’eau de mer, huit boutiques, un casino, un dancing…
Une icône du style paquebot
Sa longue silhouette blanche de paquebot surmontée d’une cheminée de transatlantique nous éblouit à des kilomètres à la ronde. Le Latitude 43 fait figure d’icône du style paquebot, « Patios, porte-à-faux, brise-soleil, pergolas caractéristiques de l’architecture méditerranéenne se marient avec un traitement des volumes et des ouvertures emprunté à la construction standardisée des navires et des automobiles » expliquent l’historienne Armelle Lavalou et l’architecte Thierry Champalle. Le parti prix architectural est ambitieux et remarquable : dans chaque chambre, l’orientation nord-sud permet de profiter d’une vue magique sur la mer et la pinède. Les tons sont clairs, le décor sobre. L’architecte qui aime l’idée du luxe non ostentatoire ne laisse rien au hasard dessinant aussi les meubles, les appareils électriques, les tenues du personnel, le sigle de l’hôtel, l’affiche et le prospectus publicitaire. Dans chaque pièce, les assiettes, les verres, l’argenterie Christofle, le linge de table, tout est estampillé Latitude 43. C’est Pingusson, passionné de voile qui trouve le nom de l’hôtel, en référence au 43ème parallèle au large des îles d’Hyères.
Six mois de travaux et quatre saisons d’existence
Les travaux sont faits en un temps record – 6 mois à peine – grâce à deux équipes de 200 artisans travaillant jour et nuit. L’hôtel est inauguré en grande pompe le 18 juillet 1932 en présence de 500 invités dont Colette et Raimu. Mais son fonctionnement s’avère vite trop coûteux. En 1936 la faillite est déclarée par le tribunal. Un an plus tard la société est vendue, Renée Gaudin est ruinée. A Pâques 1938, le nouveau propriétaire organise une seconde inauguration, la déclaration de guerre de 1939 brise ses rêves, le Latitude n’accueillera plus jamais de clients… Pendant la guerre, l’hôtel est réquisitionné. D’abord par les troupes d’occupation puis par l’armée du Général Patch, une plaque posée dans le parc commémore l’événement. En 1948 le bâtiment est racheté par un promoteur et transformé en appartements. Pingusson, visiblement très attaché à « son » hôtel écrit au ministre de la Reconstruction pour empêcher l’affaire. Ses démarches ne donnent rien. En 1992, le Latitude est inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, il est aujourd’hui une résidence de luxe. L’association Patrimoine Tropézien a retracé cette belle histoire lors de son exposition annuelle qui s’est tenue ce printemps en ville.
Texte par Carine Roux, d’après La folle histoire du Latitude 43 d’Armelle Lavalou et Thierry Champalle
(Eds du Linteau, 2013)